Droits d'auteur

La rémunération de droits d’auteur de retour pour les professionels du numérique? Du changement en vue!

7 février 2025

L’une des mesures proposées dans l’accord du nouveau gouvernement belge est de réintroduire le régime fiscal favorable aux droits d’auteur pour les professions numériques, après avoir été exclu par le gouvernement précédent dans le cadre de la réforme majeure entrée en vigueur le 1er janvier 2023. 

Beaucoup présentent cette annonce comme un simple rétablissement du régime fiscal applicable avant la réforme controversée de 2023. Cependant, les choses ne sont pas si simples et ne seront certainement pas les mêmes qu’avant la réforme de 2023. 

En tout état de cause, la question de savoir comment et dans quelle mesure le champ d’application du régime fiscal spécial pour les revenus des droits d’auteur sera étendu aux activités numériques reste à éclaircir.  

Vous trouverez ci-dessous ce que cela signifie pour le secteur des technologies de l’information (IT) et comment cela pourrait s’inscrire dans la réforme de 2023. 

  1. Objectif de la réforme initiale 

L’objectif de la réforme de 2023 était de revenir à l’intention initiale du régime fiscal spécial, à savoir prévoir son application aux professions artistiques dont les revenus sont irréguliers et volatils, comme les peintres, auteurs, musiciens, etc. Ainsi, dans le cadre de cette réforme, une définition plus restreinte de l’ « œuvre protégée par le droit d’auteur » a été adoptée, excluant les logiciels. 

Conformément au récent accord de gouvernement, les revenus issus du transfert ou de la concession de licences de logiciels seraient à nouveau éligibles au régime fiscal spécial. 

Avant d’être trop optimiste, il est important de noter que les contraintes existantes de la réforme de 2023 n’ont pas été strictement été évoquées, ce qui signifie donc qu’elles devraient affecter de manière significative l’éligibilité du secteur de l’IT au régime spécial. Une vue d’ensemble de ces contraintes est présentée ci-dessous. Il reste à voir si elles persisteront sous leur forme actuelle. 

  1. Champ d’application de la réforme de 2023 

La modification la plus importante apportée par la réforme de 2023 au régime des droits d’auteur est que ses bénéficiaires doivent désormais (i) soit posséder un certificat d’œuvre artistique, (ii) soit céder ou concéder sous forme de licence les droits d’auteur de leur œuvre à un tiers en vue d’une communication au public, d’une représentation publique ou d’une reproduction. 

Un certificat d’œuvre artistique est délivré par la Commission du travail des arts via la plateforme Working in the Arts. Pour l’obtenir, il faut démontrer une pratique professionnelle artistique dans le domaine des arts. 

Une pratique professionnelle signifie que vos revenus et votre investissement en temps sont suffisants pour couvrir une partie de vos besoins. 

Une pratique artistique signifie la pratique effectif d’une activité artistique (technique/de soutien) dans l’un des huit domaines définis par la loi (arts audiovisuels, arts plastiques, musique, littérature, spectacle, théâtre, chorégraphie ou bande dessinée) et une contribution nécessaire à une création ou représentation artistique, c’est-à-dire sans laquelle le même résultat artistique ne pourrait être atteint. 

Étant donné que, dans le cadre du régime actuel (2023), un certificat d’œuvre d’art n’est pas disponible pour la majorité du secteur IT (comme le confirme l’exposé des motifs de la loi), cela signifie une exclusion de facto des personnes qui produisent des œuvres protégées par le droit d’auteur et qui ne sont pas destinées à la communication au public, à la représentation publique ou de la reproduction, ce qui est le cas des services bénéficiant par exemple à des particuliers ou qui s’inscrivent dans la plupart des relations B2B. 

A ce jour, il n’y a pas eu d’indication claire quant au maintien ou non de cette limitation, qui a un impact sur les professionnels du secteur IT. Si tel est le cas, toute activité du secteur IT devra être soigneusement analysée au cas par cas afin de vérifier si elle entre dans le champ d’application du régime. 

  1. Plafond absolu 

Le plafond absolu de 37.500 EUR (non indexé) bénéficiant du régime fiscal favorable est maintenu.  

Toutefois, le régime fiscal spécial ne s’applique plus lorsque la moyenne annuelle des revenus bruts issus des droits d’auteur perçus au cours des quatre périodes imposables précédentes dépasse ce plafond. 

Cette limitation ne devrait pas affecter les professionnels du secteur IT par rapport à la situation antérieure à la réforme pour autant qu’ils veillent à rester en dessous des seuils susmentionnés, faute de quoi ces revenus seraient traités comme des revenus professionnels. 

Exemple : 

  • Revenus bruts issus des droits d’auteur pour la période imposable 2023 : 40.000 EUR  
  • Revenus bruts issus des droits d’auteur pour les périodes imposables respectifs de 2019 à 2022 : 100.000 EUR, 70.000 EUR, 50.000 EUR et 60.000 EUR, soit une moyenne de 70.000 EUR, supérieure au plafond de 64.070 EUR (37.500 EUR indexé). 
  • Le régime fiscal spécial n’est pas applicable pour la période imposable 2023 et le revenu brut de 40.000 EUR sera imposé comme revenu professionnel (avec un crédit d’impôt pour le précompte retenu sur ce montant). 
  1. Plafond relatif 

Un nouveau plafond relatif a été introduit par la réforme de 2023 (codification d’une pratique existante) selon lequel le régime fiscal favorable ne s’applique pas lorsque le ratio entre la rémunération liée à la cession de droits d’auteur et la rémunération totale (y compris celle du service rendu) est supérieur à 30 % (50 % pour l’exercice fiscal 2024 et 40 % pour 2025 en tant que mesures transitoires). Autrement dit, les revenus issus des droits d’auteur dépassant ce ratio seront imposés comme des revenus professionnels. 

Ce pourcentage est notamment très sévère pour les bénéficiaires restants sous le nouveau régime par rapport à la pratique de la commission des rulings fiscaux avant la réforme. Si ce plafond relatif est maintenu (et on peut raisonnablement s’attendre à ce qu’il le soit), certains professionnels du secteur IT ne bénéficieront certainement pas des avantages du régime comme ils le faisaient avant la réforme de 2023. 

Exemple : 

  • Un artiste cède ses droits d’auteur à un tiers qui les exploite et le rémunère à hauteur de 45.000 EUR pour ces droits et 30.000 EUR pour ses services en tant que directeur artistique de l’entreprise, soit un total annuel de 75.000 EUR
  • En appliquant le plafond relatif, le régime fiscal favorable s’applique à un montant de 22.500 EUR (30 % de 75.000 €) et le montant de 52.500 EUR restant sont imposés comme revenus professionnels. 
  • Si la rémunération totale avait été de 210.000 EUR, dont 70.000 € en droits d’auteur, alors le plafond relatif de 30% aurait été respecté, mais le plafond absolu de 64.070 EUR (37.500 EUR indexé) aurait été dépassé, ce qui signifie que le régime fiscal favorable s’appliquerait à un montant de 64.070 EUR et que le montant de 145.930 EUR restant serait imposé comme revenus professionnels. 

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