Levée de fonds

Que peut négocier un investisseur dans un prêt convertible?

9 novembre 2024

Dans le cadre d’un prêt convertible, l’investisseur va généralement se trouver dans une position moins favorable que s’il avait conclu un investissement en actions.

D’une part, dans la perspective d’un succès de la société, sous la réserve importante des possibles effets modérateurs de la décote (discount) et de la valorisation maximale (cap), il est probable qu’il voit l’effet dilutif de sa conversion réduit par rapport à un investissement qu’il aurait immédiatement réalisé en actions dans la société (voir notre article Ne confondez plus décote et cap dans le prêt convertible!).

D’autre part, si l’investisseur avait investi en actions, l’investisseur aurait alors reçu des droits d’actionnaires en vertu de la loi mais aussi d’un pacte d’actionnaires qu’il aurait certainement pris la peine de négocier. C’est ainsi qu’il aurait pu influer sur la gouvernance de la société, sur les mécanismes régissant les cessions d’actions, sur la stratégie d’exit et imposer des contraintes aux fondateurs (non-concurrence et non-sollicitation, interdiction temporaire de cession de leurs actions et good/bad leaver).

Certains investisseurs professionnels, particulièrement les fonds d’investissement, vont ainsi tenter d’obtenir des droits particuliers dans le cadre de la convention de prêt convertible afin de tempérer la perte des droits qu’ils auraient eus s’ils avaient investi en actions. Les actionnaires historiques pourront aussi prendre l’initiative de proposer ces droits afin de rassurer les candidats investisseurs qui se montrent hésitants à investir via un prêt convertible.

Droits d’information et de contrôle / gouvernance

Avant la conversion, le prêteur est considéré comme un simple créancier, ce qui signifie qu’il n’a en principe aucun droit de regard sur le fonctionnement de la société et aucun rôle dans sa gouvernance. Cela est fondamentalement différent des actionnaires, qui disposent de divers droits en vertu du Code des sociétés et des associations, des statuts de la société et du pacte d’actionnaires. Par conséquent, la convention de prêt convertible inclut généralement certaines clauses leur offrant un droit à l’information et un droit d’audit, voire dans certains cas un droit de veto concernant certaines décisions importantes (qui à défaut d’accord donnerait lieu à la conversion du prêt ou à son remboursement immédiat). Certains investisseurs demandent également à obtenir un observateur au sein du conseil d’administration.

Rôle actif des fondateurs/maintien des fondateurs dans l’actionnariat de la société

Le maintien de l’activité des fondateurs est une condition sine qua non des investissements dans les startups et scaleups. Dans le cadre d’un investissement en actions, cette condition est sanctionnée dans les pactes d’actionnaires par les clauses good/bad leaver autorisant les actionnaires, voire la société elle-même, à racheter les actions des fondateurs. Afin de s’assurer du respect de cette condition lors d’un investissement en prêt convertible, l’investisseur pourra exiger que l’inactivité (non excusable ou non approuvée, évidemment) d’un ou plusieurs fondateurs, le cas échéant sans remplacement satisfaisant endéans un certain délai, constitue une cause de remboursement immédiat du prêt convertible. La même sanction pourra s’appliquer en cas de vente par un fondateur de tout ou partie de ses actions de la société dans un certain délai à compter de la conclusion du prêt.

Non-concurrence et non-sollicitation

Comme souligné juste avant, le retrait d’un fondateur, comme collaborateur ou comme actionnaire de la société, est un impératif pour les investisseurs. Dès lors, une telle sortie, qui s’accompagnerait d’un passage à la concurrence est une situation totalement insupportable pour tout investisseur (comme pour tout autre stakeholder par ailleurs…). Une telle situation devra donner lieu également à un remboursement immédiat et/ou à une pénalité directement due par les fondateurs à l’investisseur. Nous recommandons évidemment de limiter la sanction à la pénalité du fondateur sous peine d’imposer à la société (et indirectement aux actionnaires historiques) une double-peine, le départ à la concurrence d’un fondateur et le remboursement anticipé du prêt.

Pacte d’actionnaires futur 

Plus généralement, à l’occasion de la conversion du prêt, le prêteur devra adhérer au pacte d’actionnaires de la société. Si cet accord doit être modifié à cette occasion, le prêteur veillera donc à déjà prévoir dans la convention de prêt convertible les dispositions du pacte qu’il souhaite voir mises en œuvre ou modifiées.

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